samedi 24 janvier 2009

Une fois...

…n’est pas coutume. L’évènement est suffisamment rare dans Lacuvette pour que l’on s’y attarde un peu, coupant par la même la chique sous le pied du JM, le privant de son 50eme commentaire. Comme quand il révèle les méthodes d’un 8 des Lames, il avait raison le bougre, un peu de jet set, une star bien sentie assortie du rêve d’un stickers dédicacé et le nombre de lecteurs s’envole !!
Bravo pour ton record absolu du nombre de commentaires, qui restera bien difficile à battre, tout comme les 604 visites en 10 jours, rien que pour toi, dont un indien de Mumbai qui a du s’endormir sur tes propos en restant connecté 44min sur Lacuvette...pas de panique, pour la prochaine sieste l'interview reste disponible dans la rubrique Paroles de stars. Merci encore pour cet échange qui m’a rappelé la grande époque…Sache que je caresse maintenant le doux rêve de te laisser bientôt narrer quelques uns des morceaux de l’histoire cuvettarde, comme… la naissance d’Espace Comboire par exemple !!
Le stikers reste bien sur en jeu…et je double la mise, avec un joli stickers eb, pour celui qui saura retrouver l’objet égaré par Schnappi sur une des photos de ce post.
Ce n’est pas si souvent disais-je. La dernière fois ce devait être Diego (et oui, encore….un pilier de l’histoire cuvettarde) et sa première dans Dyonisos, le 8c de la Grande DJ. Cette fois ci, on se rapproche des limites de Lacuvette, sur l’extrème bord du rebord. Tout s’est passé dans le site de haute montagne, que l’on ne peut atteindre qu’avec de bouteilles d’oxygène, au prix de longues heures de marche : St Pancrasse. J’appris la nouvelle au hasard de bavardages avec Phildar, bienheureux ouvreur de la voie en question et équipeur aux talents éclectiques reconnus, aussi à l’aise pour dénicher des joyaux perdus à Rioupéroux, que pour sacrifier 1m² de cailloux pour tailler un sale bi tendu en bousillant une mêche de 12 dans une falaise dont nous tairons le nom, pour découvrir un secteur majeur comme ce Tetard Park ou pour oser équiper ouvrir au Petit désert, là ou aucun autre n’aurait osé…
Plutôt que les longues proses ennuyeuses habituelles, place à un échange croisé, entre ouvreur (d’abord) et FA-Teur (ensuite), le discret mais efficace Charlie. A l’heure où ils sont nombreux ceux qui se plaignent du froid, de la neige ou de la baisse de Wall Street, il a su s’acharner, dans le pur style de mort de faim de Lacuvette, sur Mange ta soupe, potentiel 8c de Tétard Park
Phildar, c’est quoi ce nom ‘Mange ta soupe’. Quel était ton trip mystique de l’époque ?
Et pourquoi pas… ‘’Mange ta soupe’’. Le talent ne se commande pas, parfois il ne faut pas chercher à expliquer les éclairs de génie comme cela…
Comment t'es venu l'idée d'équiper une voie si dure ?
J'étais bien à fond pour équiper à ce moment la. J'ai équipé celles d'à coté et j'ai tout de suite été absorbé par la pureté de la ligne…mais je n'ai pas voulu la violer à coup de perfo comme celle de droite !
Bon ok, j'avais taillé un bidoigt moche et inutile au départ. Apres en avoir discuté avec Quentin et Charlie, je suis allé le reboucher. C'est pas beau ca ??
Du coup, ce qu'a fait Charlie est entièrement naturel…enfin… presque… il y a juste une petite arquée pas trop moche. Et pour rendre à César, il y a aussi Foué qui a rallongé les 4m de 6b pour finir tout en haut
On l’a échappé belle, tu aurais pu refaire... comme aux Brieux, un 7b hideux sur bi douloureux ?
Mais qu’est ce que tu dis, je suis jamais allé au Brieux !
Tu pensais que c'était faisable ?
Oui bien sur. Même si je n'arrive pas à faire les mouvs, j'arrive en général bien à voir si les pas de blocs sont possibles ou pas. Le fait d'avoir pas mal grimpé en bloc (Ndlr à Rioup !!) et avec des mutants de Lacuvette comme Rackam ou Yohan Dard, j'ai un bonne idée de ce que pourrait être le haut niveau.
En haut, il y a une section qui parait dure au premier abord mais avec plein de petites prises toutes moisies. C'était évident que ça puisse passer et ça aurait été vraiment dommage de tailler, la preuve !!
Ca vaut 8c, ou comme tu me l'as dit en aparté, Charlie est un gros mytho ?
Je ne sais pas, il faut voir avec lui !! Quentin lui penche pour 8c.
Mais j’ai prévu d’inviter Adam Ondra pour voir :.s’il la rate à vue, ça sera 8c !
C’est un mutant Charlie ?
Il est bien fort et surtout super motivé. Et puis c'est marrant, on grimpe un peu pareil avec Charlie, sauf qu'il est un poil plus fort et moi vachement plus beau
Malgrès les ¾ de marche épuisante de St Pan, y’a d’autres mulets qui se sont attelés au projet ?
Pas mal je crois, surtout pour la première partie mais peu ont insisté pour la version longue, avec les croutons, c’est à dire jusque en haut
Bon allez, fait nous rêver, ca ressemble à quoi ?
Ca fait plus de 3 mouvements donc malheureusement c'est de la conti pure ! Ca commence par un pas de bloc, avec une nouvelle méthode plus facile que l’originale que je faisais. Ensuite une partie en 6b, puis une section de 5m dure sans repos pour arriver sur les 3 mouvements blocs du haut. Cette section vaudrait 7b+ bloc d'après Quentin, cotation Rioup’ bien sur ! Et enfin ça finit par 5m un poil plus facile mais sur des croutons pas facile à tenir, surtout après les 20 premiers mètres ... C'est un peu le biographie de Lacuvette en fait…mais que fait Chris Sharma ?
C'est toi qui assurais Charlie ?
Oui mais pour ses 5 premiers essais, lorsqu’il travaillait la première partie uniquement (c'est son échauffement!). Ensuite, j’étais là une flopée de fois pour la suite, un truc comme 25 essais je pense, à le voir tomber tout près du but !! Il aurait mieux fait de pipoter comme les autres sur 8a.nu et se la valider , ça aurait été moins fatigant !
C’est le grand Foué qui était au grigri lors de l’assaut final et qui a eu droit au bon vieux grognement de sanglier !
Y’a eu Schnappinerie pendant l’essai ?
Aucun doute, ce n'est pas le style ! Il a juste schnapiné la première dégaine car le point est mal mis…un blaireau cet équipeur…
T'as pleuré quand tu as appris la nouvelle, par ce que qu’il t’avait piqué le FA ?
Je pleurerai quand il payera sa tournée de sous marins !!! Il y a des traditions qui se perdent !!
Sinon, je n'ai pas le niveau de faire du 8c alors…même pour les autres voies du secteur, je n'ai pas fait les premières. J'attends parfois trop longtemps avant d’y aller et puis ce serait stupide d'interdire aux autres d'y aller tant que je n'ai pas fait la croix. C'est marrant que se soit finalement un pote qui l'ai faite et qu’il est pris du plaisir…
Quand j'ai équipé, je voyais trop Chris Sharma en train de faire les mouvements, il en chiait comme un putois et il poussait des hurlements qu’on entendait dans toute la vallée. Alors forcément, je suis un peu déçu que ce soit un pauvre clochard comme Charlie qui est torché ça !
Et pour la FA, descendre en rappel et mettre les points, c’est aussi une première !
Alors Charlie, il parait que pour une fois tu as du t’employer ?
Ca oui, j'ai du faire une bonne dizaine de séances… sans compter celles d'avant pour seulement enchaîner la 1ère partie (Ndlr, seulement 8b et n’ayant connu que 3 autres réalisations). Je me suis acharné parce que ce n’est pas loin de chez moi, c'est pratique pour taper des essais... Je me suis mis dans le 8b que j'ai vite torché, mais après avoir eu les méthodes.. merci Quentin. Ensuite j'ai essayé le haut et comme je faisais tous les mouvs, je me suis dis que ça n’allait être qu’une question de temps.
T’en as pas eu marre ?
A force de refaire les mêmes mouvs, ça me saoulais, limite je me déconcentrais une fois arrivé au repos, en me disant que j’avais encore tout le dur à faire. Je suis tombé pleins de fois après, sans savoir pourquoi, alors que je me sentais pas trop mal.
C’est dur un 8c ?
Pour la côte, comme toute première c'est à confirmer bien sûr, surtout que c'est ma première voie dans ce niveau. Je n'ai jamais fait de 8b+ et je ne compte que deux 8B à mon actif. Je manque forcement de références.
Par rapport aux autres voies que j'ai pu essayer dans le 8b+, je trouve le crux plus dur. Quentin qui fait plusieurs 8c de référence comme Fatal mambo a Pierrot, le minimum à Buoux, la métaphysique à Seynes… pensait que c'était 8c à la période où il essayait un peu. Je le remercie d'ailleurs de m'avoir donné les méthodes parce qu’au début je ne pannais rien du tout. Même dans le 8b je ne faisais pas les mouvs à cause de la méthode en bois de Phildar...
Il faudrait qu'il vienne la torcher pour dire ce qu'il en pense vraiment. Ce serait cool aussi de voir des gars forts du coin dedans comme Mickey Fuselier, ou les mules de Chambé, ou mieux encore ton pote François ! Mais dis leur de pas torcher trop vite quand-même, et de faire au moins semblant d'en chier un peu !!
Qu’est ce qui t’a le plus couté ?
Le coté mental !! Une fois les méthodes acquises, je faisais assez bien toutes les sections, je pensais que ca allait vite faire mais j'ai du tomber 10 fois juste après avoir clippé le 1er relais, alors que je me sentais pas pire. Je suis tombé aussi 5 fois dans le crux et 5 fois au dernier mouv, une fois même avec la dernière prise dans la main, sans pouvoir réarmer.
Les dernières séances ont même été des vrais supplices : pas envie d'y aller, boule au ventre, envie de vomir : de la vraie escalade, de la falaise où tu te fais vraiment plaisir quoi !!
J'ai même fait un run en zippant pleins de fois à la suite, et une fois au sol je me suis rendu compte que j'avais les jambes qui flageolaient...
Phildar m’a dit que c’etait vraiment majeur, mais comme avec lui il faut toujours se méfier, je préfère te demander ton avis.
Ce n’est pas une voie de conti qui déroule, c'est plutôt typé bloc et à méthodes, donc pas forcement évident au premier abord, En fait tu as un départ assez forçu sur les 3 première paires où tu dois trouver la méthode qui te convient. Après c'est facile sur les 4 paires suivantes et tu arrives à un bon repos. Tu enchaines une petite dizaine de mouvs pour arriver au 1er relais. Tu te retrouves alors en épaule main gauche sur une règle, pas moyen de délayer ni de pofer, tu enchaînes ensuite les 4 mouvs sur croutes qui donnent la côte de la voie ! Pour finir, une décontraction pas top mais comme je ne suis pas une star du délayage je ne peux pas dire et tu finis par enchainer les 4 dernière paires jusqu'au relais où ca grimpe bien. Mais si t'es vraiment au tas, il y a moyen de te la coller.
Le crux de la voie se trouve donc juste après le relais du 8b.
Heureux d’avoir Fater ?
Ca m'a vraiment fait bizarre d'enchaîner, sur le coup je me rendais pas trop compte. J'avais l'impression que ce n’était pas vrai. Tout ca pour ça quoi !
C'est difficile de savoir pour la cotation. La première fois, quand tu pars trouver les méthodes, tu trouves ça mutant, et puis, une fois que tu as enchaîné, finalement tu te dis qu'en fait ce n'était pas si difficile.
Ce qui est sur, travailler une voie comme ca m'a beaucoup apporté. Maintenant je ne vois plus les choses de la même façon. Avant, je grimpais comme ca, dans des voies pas trop dures, un peu au hasard des sorties, le but étant de les plier en 2/3 seances max.
Quand je me suis mis dans Mange ta soupe, je me disais qu'une fois ce projet torché, je ne m’investirai plus dans des chantiers, que j’irais plutôt faire plein de voies plus faciles et surtout plus rapidement… Mais maintenant je suis remotivé comme jamais, j’ai envie de me remettre dans de vrais gros chantiers, un peu partout dans Lacuvette !
Il y a un an encore jamais je n’aurais imaginé mettre les pieds dans un 8c, pour moi c'était la cotation ultime !! Finalement, ça me laisse des perspectives pour l'avenir... Et maintenant ?
C’est parti pour les gros projets sur Lacuvette : Combat de ruses, le 8b+ de Voreppe, Rage le 8b+ de Comboire, Amour sauvage aux Lames, la rencontre du 3ème spit à St Pan et la dernière de Toufic, le moukos, 8b. Pour te faire plaisir, y’a aussi Espace Comboire, le 8b me dit bien, mais il paraît que c'est vraiment très dur. J'irais bien faire un tour dans Morituri, mais le crux c’est d’arriver à trouver des gens motivés pour t’accompagner !!
Sinon, je vais équiper une nouvelle voie à Tetard, je pense que ce sera très dur et super classe !! Bref, des centaines de runs en perspectives!
Il y a aussi le Vercors, comme fatal mambo mais ca fait un peu loin pour taper des runs et des runs...

Merci et bravo messieurs, pour avoir su dénicher cette voie insigne, pour avoir persisté dans l'épreuve, et surtout pour s'être prêter, à chaud, au jeu des questions singulières de Lacuvette …
Bon et maintenant à qui le tour ??

mardi 13 janvier 2009

1 an déjà...

Pour sa première année d’existence, celle des premières découvertes, des premières conquêtes, des premières expériences, Lacuvette s’est offert un tête à tête privilégié avec un de ces cuvettards de la première heure, de la grande époque. En ces temps reculés, je découvrais juste que P.Edlinger n’était pas une star pour les petits clous du top 50 mais plutôt un grand escaladeur. Il était venu faire une démonstration sur la falaise de St Egrève, que je regardais depuis toujours au travers de la fenêtre de ma chambre, sans jamais avoir imaginer qu’elle puisse servir à autre chose qu’à embellir le paysage. Et il changea ma vie…
Mais il n’y avait pas que Dieu que grimpait, loin du strass et des paillettes, le microcosme de la grimpe cuvettarde grouillait déjà d’activité. Je me souviens avoir vu naitre les premiers 8 de la vallée avec cette folle équipée, en particulier aux Lames, tandis je faisais mes premiers pas timides dans les fleurs du bien, Sainte et Soph puis plus tard dans hasard et nécessité. Je garde de mes brèves rencontres avec ce pilier local, 3 profondes convictions, les mêmes que beaucoup d’autres grimpeurs ayant croisé sa route. La première, c’est que grimper en famille est un véritable sacerdoce, qu’il faudra savoir se pourrir et s’engueuler avec père et femme, jusqu’à se perdre en interminables joutes verbales et sonores…faisant fuir le reste des grimpeurs….La seconde, c’est que randonner dans le 8, veut aussi dire connaitre par cœur les mouvements de l’intégralité des voies de la falaise, du 3 au 8, même en ne les ayant fait qu’une fois il y’a plus de 10 ans. La troisième c’est que la marque de fabrique lacuvette c’est cette motivation démesurée qu’il fallait pour grimper aux Lames, tant les voies se méritent, tant il faut taper des essais, à répétition, et avec une éthique aujourd’hui disparue.
Parole à Jean-Marc Chenevier, sur la photo le plus joufflu et le plus dégarni des deux, plus habitué à se cacher derrière sa plume que de parler de lui, le rédac chef d’un des rares magazines qui, comme Voici, peut me faire rester des heures assis sur le trône : Grimper

Le rédac-chef de Grimper à Grenoble, pouvait-il en être autrement ?
Dans la mesure où l’éditeur du magazine est à Grenoble, non ! Mais c’est vrai que Grenoble est un centre névralgique important du milieu de la grimpe. On y trouve des wagons de grimpeurs, des sites de pratique en pagaille, des fabricants notoires et bon nombre de distributeurs de marques de matos. Malgré tout, Grimper pourrait être fait ailleurs sans problème…
Comment caractériserais-tu le milieu des grimpeurs grenoblois ?
Très franchement, il me paraît plutôt sympathique et pas trop « prise de chou » en comparaison de ce que j’ai pu parfois constater dans d’autres régions. Il est surtout carrément énorme en termes de nombre de pratiquants ! Cela lui assure une diversité intéressante et une réelle dynamique avec sans cesse des jeunes qui arrive dans l’activité. Et puis il faut reconnaître que Grenoble a la chance immense de posséder un stock de falaise unique et que cela contribue sûrement à en faire un vivier de talents. Ce n’est pas pour rien que biens des pointures passées ou actuelles ont un lien avec cette ville.
Y-a-t-il un style, une ambiance particulière ?
Je n’ai pas l’impression, mais il est possible que je me trompe car je suis nettement moins présent sur les sites. En revanche, il me paraît clair que les gens du coin sont plutôt cools et ne se prennent pas le citron sur les histoires de cotations ou autres futilités qui moisissent parfois l’ambiance ailleurs
Si tu devais citer le plus beau 6a, le plus beau 7a et le plus beau 8a de lacuvette ?
En 6a, “Alta Rica” aux Lames. En 7a, “Cadavre exquis”, encore aux Lames . En 8a, “Sidi H’Bibi” à Espace Comboire. Mais c’est dur de choisir parce qu’il y en a vraiment plein d’autres du même tonneau…
Ton plus beau et ton pire souvenirs de grimpe en pays cuvettard ?
Mon meilleur souvenir ? Sans doute le jour où j’ai fait “Je grimpe donc je suis” aux Lames : lendemain de cuite, j’ai vomi dans le sentier de montée ! En allant poser les paires, je faisais à peine les mouv’ tellement j’étais mort. J’avais laissé la corde en moul’ pour remonter virer le matos et l’autre zouave de Vincent Maillocheau me l’a tirée pendant que j’allais pisser ! Il m’a dit de mettre un essai, que ça ne coûtait rien. Moi je lui ai dit que ça allait me coûter mon jeu de dégaines que je ne pouvais pas remonter chercher dans la voie, mais bon… Du coup, je suis parti dans la voie comme ça et j’ai enchaîné en marchant comme dans du 2+. Va comprendre !
Quant au pire souvenir, très franchement je n’en vois pas. Juste des bons coups de nerf à rater des voies comme un con le nez sur le relais. Mais à partir du moment où tu es dehors à pouvoir grimper sur du caillou, hormis se blesser je ne vois pas comment ça peut être un mauvais moment !
Y’a-t-il de belles falaises en dehors de lacuvette ?
Il paraît… J’ai ouï dire que certains bouts de cailloux comme Céüse, Buoux, St Léger et quelques autres ne sont pas mal. Pour rester dans le ton de ce blog, je crois qu’on ne peut décemment pas affirmer qu’il y a vraiment mieux qu’Espace Comboire ou Les Vouillants, non ?
Bon, plus sérieusement, le monde est farci de belles falaises et j’ai eu le privilège, par des voyages ou pour le boulot, d’en grimper certaines. Dernièrement, mon plus gros coup de cœur a été pour Red River Gorge aux USA. Vraiment surmythique !
Après un trip à l’autre bout du monde, qu’éprouves-tu à toucher le bon vieux calcaire cuvettard ?
Le même plaisir qu’au premier jour de grimpe à La Carrière. Du moment que je suis sur le caillou, je suis content. Peu importe le lieu, le niveau de la voie, ce qui compte c’est que tu passes un bon moment. Mais ici dans la cuvette, il y a plein de voies qui me rappellent des souvenirs, alors c’est un petit plus…
As-tu le temps de parcourir les dernières nouveautés locales ?
Pas vraiment. Très honnêtement, je grimpe vraiment peu et le peu d’occasions que j’ai de traîner en falaise, je les passe maintenant plutôt du côté du Vercors. Du coup, les news d’Espace Comboire et autres, je ne connais pas plus que ça. Honte sur moi, je sais…
Tu t’investis dans le développement de la grimpe locale ?
Là encore, non. Je n’ai déjà presque pas le temps de grimper, alors équiper tu penses bien… Je préfère laisser ça à mon père qui a plus la fibre et le temps (ah les retraités !). Ma seule action locale, c’est de participer à la rédaction du futur topo fédéral.
Lolette, une base de lacuvette
Phacochérisation express (que) 6c+

Quel souvenir gardes-tu de l’épopée F. Legrand, V. Albrand, Y. Ghesquiers ?
C’était assez incroyable de voir cette scène grenobloise faire ce qu’elle a fait. Il y avait là toute une bande de gaillards vraiment surmotivés et hyper forts, au top de l’époque mais assez discrets. Le niveau grenoblois de l’époque était parmi ce qui se faisait de mieux avec ceux que tu as cités, mais aussi avec plein d’autres : Jean-Luc Jeunet, Stef Fressoz, les deux Romain (Gendey et Vidonne), Antoine Pécher. Il y avait une sacrée émulation lors des essais dans les voies mythiques des Lames et aux prémices d’Espace Comboire ! Et voir un François Legrand percer et tout niquer en compéte, ça a été impressionnant. Il y avait aussi des sacrés clients bien pointus avant, en même temps ou après : Nicolas Janel, Riton Rillh, Pascal Faudou, Philippe Plantier, Snoopinette Lepron, Jean-Claude Gilles, Vincent Maillocheau (toujours là d’ailleurs) et quelques autres que j’oublie certainement.
Es-tu nostalgique, c’était mieux avant ?
Non, pas de nostalgie, ce n’est pas dans ma nature. Juste de bons souvenirs ! Et puis on en a encore des bons aujourd’hui avec le Pin, Quentin, Erwan, Dédé Bouvet quand il est par là et tous les jeunes autres que je connais moins ou pas.
Qu’est-ce qui t’impressionnait à l’époque ?
À l’époque, des grimpeurs comme Stef Fressoz m’impressionnaient vraiment pas leur motivation à s’entraîner et à progresser. Romain « Satan » Vidonne pour sa hargne à mettre des essais sans relâche jusqu’à ce que ça fasse. Yann Ghesquiers et Romain Gendey pour leur talent à l’état brut. Vincent « Kellog’s » Albrand pour sa force. Et plein d’autres pour plein de bonnes ou mauvaises raisons !
Et aujourd’hui ?
Aujourd’hui, ce qui me fascine, c’est le nombre de mecs (et filles d’ailleurs !) qui tiennent les prises comme dix. Le niveau a vraiment monté. Mais ce qui est rassurant, c’est de voir que les voies mythiques de l’époque tiennent encore la route aujourd’hui. Il n’y a qu’à voir le nombre de réussites à vue dans les trucs des Lames ou d’Espace Comboire !
Vous rêviez que quoi en ces temps reculés ?
Je ne peux pas parler pour les autres, d’autant qu’ils étaient tous plus forts que moi donc avec d’autres ambitions sûrement. Pour ma part, mon objectif de l’époque était d’avoir un bon niveau d’amateur que je qualifiais ainsi : faire après travail ce que les meilleurs font à vue ! Je m’y suis tenu longtemps, mais c’est désormais loin d’être le cas. Les forts sont devenus trop forts et moi trop faible !
Et aujourd’hui ?
Aujourd’hui, mon rêve c’est juste de passer du bon temps sur des belles falaises, juste pour le plaisir. Les croix, les cotations, c’est loin de moi maintenant.
Vos parcours respectifs dans le milieu t’étonne-il aujourd’hui ?
Oui et non. François Legrand a fait une belle carrière, on pouvait le sentir. Diego Ghesquiers est toujours à toc, comme à l’époque ! Je crois que nous sommes quand même tous encore plus ou moins en lien avec la grimpe et cela prouve que notre attachement de l’époque à cette pratique est bien passionnel. Quant à moi, si je suis à Grimper aujourd’hui, c’est quand même un peu un concours de circonstances !
Touche Grigi, 8a, Lolette encore

La révolution de l’escalade a-t-elle déjà eu lieu ou se profile-t-elle à l’horizon ?
Il y a déjà eu des révolutions en escalade, comme la venue du libre par exemple. Je crois que nous vivons en ce moment une mutation du haut niveau avec quelques mecs mutants qui vont faire péter certains standards. Ce n’est pas le 9b qui va arrêter un jeune comme Adam Ondra… Et quand le haut niveau monte, le reste de la pratique suit. Il n’y a qu’à regarder les petits jeunes d’aujourd’hui : on a l’impression que pour eux l’escalade commence au 8a (ils en font très vite) alors que c’était presque l’aboutissement d’une carrière il y a vingt ans…
Comment vois-tu évoluer la grimpe dans les années à venir ?
Je suis assez inquiet quant à l’avenir de l’accessibilité des sites naturels à cause d’une part du nombre croissant de pratiquants et des problèmes induits par une fréquentation en hausse, mais aussi à cause de « l’inculture » de beaucoup de grimpeurs par rapport à l’histoire de notre activité. En revanche, je prédis une bonne rentabilité aux salles d’escalade !
Justement, nous les anciens, a-t-on un devoir de mémoire, et comment s’en acquitter ?
Oui, il faut garder la mémoire de ce qui se faisait avant que l’on arrive sur ces cailloux. Cela concerne par exemple l’équipement des voies : il ne viendrait pas à l’idée de modifier l’emplacement des points d’une voie (au rééquipement ou pas) sans demander son avis à l’ouvreur et même si la voie est équipée n’importe comment, engagée ou exposée.
Que nous apporte la nouvelle génération ?
Des barrières mentales repoussées très loin et qui vont faire que le niveau va encore monter.
Avec elle, est-on condamné à revivre les mêmes débats, les mêmes travers comme taille ou pas taille, rééquipement ou pas, pipotage, surcotation…)
Il n’y a pas de raison que tout change en mieux. L’homme reste homme, avec ses travers et défauts. Malgré tout, je crois que tout cela fait partie de notre univers, de notre milieu de la grimpe, que c’est signe qu’il vit et est en bonne santé. Le débat fait avancer les choses, il est positif.
Par exemple, je suis toujours prêt à discuter de la taille de prises parce qu’il y a autant d’avis que de grimpeurs. Moi, le bricolage ne me gêne pas vraiment si c’est dans des zones de rocher de toutes façons inexploitables autrement (pourri, lisse…). Je n’ai pas honte de dire que je préfère une belle voie un peu larcinée qu’une bouse toute naturelle ! Mais je conçois qu’on puisse voir les choses autrement et surtout dire cela ne fait pas de moi un apôtre de la taille à tout va. Je trouverais risible de tailler à Céüse alors qu’il reste des centaines de lignes à faire naturellement. Je trouve naze de tailler des prises pour connecter deux lignes naturelles.
Les ptits hommes verts, 7a au Ptit Désert
hommage au genie visionnaire de l'ouvreur...

Le marché des grimpeurs est-il jeune, en plein essor ou au contraire, complètement saturé et immobile ?
Il y a clairement une croissance régulière du nombre de pratiquants. En outre, et cela est lié, il y a un renouvellement régulier d’une bonne frange de ces pratiquants qui viennent à l’escalade comme à un autre « sport » et repartent ensuite vers d’autres activités. Je pense que l’on n’est pas encore arrivé au pic de croissance, mais qu’on en est pas si loin. Pour les marques de matos, je crois que l’escalade est une bonne bouée quand c’est le marasme en alpinisme ou en ski par exemple, à cause des mauvaises saisons météo. La preuve que la grimpe se porte bien !
Tout le monde "il est beau et il est gentil" dans le milieu ?
Absolument pas, le milieu de la grimpe est comme tous les autres : il possède son lot de têtes de con, d’idiots, de malfaisants, de voleurs, de menteurs, de chiants, de pinailleurs et autres pénibles. Mais il suffit de les repérer et de les éviter, comme ailleurs. C’est facile, parce qu’il y a quand même une majorité de gens biens et sympa.
C'est bien le sponsoring ?
Franchement, je ne vois pas en quoi le sponsoring serait un mal. Je pense que c’est même très bien que les marques et les fabricants s’intéressent aux forces vives de ce qui les fait vivre et les aident à eux aussi pouvoir en vivre (enfin vivoter pour ce qui concerne l’escalade). Simplement, il faut bien encadrer le sponsoring, ne pas faire n’importe quoi comme des primes à la performance (hors compétition bien sûr) qui pourraient inciter à la surcotation ou au pipotage. Mais, à ma connaissance, cela n’existe pas, alors…
Les grimpeurs pro savent-il communiquer ?
Ils sont très peu à le savoir. Le premier à bien avoir saisi le truc, c’est Dédé Dulac et ça a plutôt bien marché pour lui. Actuellement, un gars comme Alex Chabot fait bien son boulot de pro. Mais en dehors de quelques rares exemples comme ceux-là, c’est l’amateurisme le plus total. À en pleurer, parce que des gens talentueux, ça ne manque pas, mais seuls ceux qui savent le faire savoir réussisse une belle carrière maintenant. Et c’est d’autant plus dommage que les outils modernes de communication sont là.
Les forums sur le net, les sites pro, et 8a.nu pour ne pas le citer, de vraies tribunes libres, d’intarissables sources de réflexion, une vaste fumisterie ?
Il y a vraiment de tout sur le web et c’en est fascinant. Les forums, je ne m’y attarde pas trop car on y trouve beaucoup de n’importe quoi, de gens qui ont un avis sur tout mais sans avoir le moindre argument fondé, sans la moindre réflexion et surtout bien à l’aise de balancer des grosses conneries sous couvert de l’anonymat. C’est souvent pitoyable. À côté de cela, il existe des espaces sur Internet où il se dit des choses intéressantes, où l’on diffuse de l’information. Le plus dur est de faire le tri.
T’arrive-t-il d’intervenir sur ces sites, à titre perso ou au nom de Grimper ?
Non, je ne participe pas à ces forums, ni personnellement ni encore moins au nom de Grimper puisque j’ai par le passé pu constater que quoi que je dise, c’est mal interprété ou retourné contre le magazine ou moi. Alors je laisse baver, c’est moins usant nerveusement !
Avant dernière longueur de Chiotte allure, 7b à Presles

Comment en es-tu arrivé à la place de rédac-chef de grimper ?
Plus ou moins par hasard ! J’avais un copain qui travaillait pour Montagnes Magazine et, lors d’une soirée, il m’a dit qu’il cherchait un stagiaire pour trois mois pour faire un hors-série. Moi, j’étais en panne de taf à ce moment-là et surtout cela m’intéressait de replonger dans l’univers de ma formation d’origine (Sciences-Po). J’ai donc bossé pour Montagnes. Grimper est chez le même éditeur et Laurent Belluard se retrouvait seul à la même période (Arnaud Petit acheté par la concurrence Roc’n Wall et Vincent Albrand parti à Aix monter la salle Grimper). J’ai donc parallèlement commencé à piger pour Grimper, jusqu’à être embauché comme rédacteur. Laurent est ensuite parti sur une autre aventure journalistique avec Skieur et Big Bike et c’est donc naturellement que j’ai repris le flambeau. Il n’y avait pas de plan de carrière !
Grimper, un mag de sports, une gazette people, une feuille de chou locale, un journal d’investigation, un magazine d’information ?
Peut-être un peu de tout ça à la fois ! Plus sérieusement, Grimper a vocation à combler les attentes d’un public mais il ne peut pas plaire à tout le monde, c’est une évidence. Malgré tout, les « recettes » d’un magazine sont appliquées et ça fonctionne plutôt bien pour ce titre dans le contexte actuel de crise de la presse. En plus, la renaissance du http://www.grimper.com/ est une véritable aventure passionnante qui va nous permettre de faire de nouvelles choses en créant une réelle synergie entre le papier et le web.
Quelle est ta vision du magazine de grimpe idéal ?
Ca dépend, idéal pour qui ? Si c’est pour moi, ce serait d’avoir une équipe plus fournie (quoique l’an passé, on a doublé l’effectif des journalistes de la rédaction : maintenant, on est deux !) pour pouvoir aller faire plus d’articles par nous-mêmes et avoir plus de temps pour faire les trucs qu’on veut publier. Pour les lecteurs, c’est à eux de nous faire savoir ce qu’ils aimeraient voir de différent dans Grimper, dans la mesure de ce qui rentre dans notre ligne éditoriale et de ce qui est faisable. Au passage, je rappelle donc que toutes les propositions d’article sont étudiées, que n’importe qui peut en faire et que c’est même payé si c’est publié !
Justement comment tu les sélectionnes ?
Le premier critère de sélection est forcément d’ordre iconographique : y a-t-il la matière photo (quantité et qualité) pour pouvoir faire x pages ? Le second est le texte et les infos données. Maintenant, il faut avoir conscience qu’on s’adapte en permanence. S’il manque des photos pour un bon sujet, on demande à ce qu’elles soient faites ou on va les faire nous (si ce n’est pas à l’autre bout de la planète). Les textes, ils sont quasiment tous plus ou moins retravaillés, la plupart du temps par moi. Et si on n’a qu’une top matière photo sans texte, on peut toujours faire un classe Portfolio !
Donc pour répondre à la question initiale de la sélection, il y a des critères objectifs, mais aussi beaucoup de subjectif, à savoir si l’article me « parle »…
Aurais-tu suffisamment de matière pour faire 12 numéros dans l’année ?
Non, et huit numéros c’est bien assez pour la toute petite équipe que nous sommes. Pour faire plus de numéros, il faudrait être plus nombreux ou avoir plus de budget pour acheter les articles à des pigistes. Mais l’économie du marché de l’escalade et sa relative saisonnalité ne le permettrait sans doute pas.
J'en profite pour te poser 2 questions soufflées par un précédent cuvettard passé au crible de l'interrogatoire avant toi, es-tu satisfait de Grimper magazine actuellement ?
Je trouve que ce que l'on arrive à faire avec les moyens qui sont les nôtres est plutôt bien. Maintenant, on peut bien sûr toujours aborder la question sous un autre angle et dire que l'on pourrait encore faire mieux que ça... Mais honnêtement, je n'ai pas honte de ce que l'on produit quand je compare à ce qui existe par ailleurs.
La deuxieme, que modifierais-tu si tu avais plus de moyens ?
Je ferais sans doute un magazine avec une pagination légèrement supérieure, imprimé sur du papier de haute qualité et sans doute dans un format pas standard (donc très cher...) pour offrir encore plus de place et de qualité à l'iconographie. Sans doute aussi plus d'argent nous permettrait de travailler avec plus de collaborateurs différents et donc de proposer une plus grande variété dans le traitement des sujets proposés dans le magazine.
Peut-on tout dire dans Grimper ?
Non, on ne peut pas tout dire dans Grimper ou dire les choses n’importe comment. La raison en est simple et elle s’appelle la loi ! La diffamation, l’insulte ça ne peut pas passer.
Encore à Presles, mais où ?

Quel est le lecteur type de Grimper ?
Pas si simple à dire car ça fait un bon moment que l’on n’a pas fait une enquête-lecteurs. Néanmoins, on peut dire qu’il habite plutôt la moitié sud de la France, qu’il fait de la falaise, dans un niveau moyen en 6/7, qu’il doit avoir entre 15 et 30 ans. Pour le reste…
À combien estimes-tu le pourcentage de grimpeurs lisant grimper ?
Bonne colle ! Il faudrait déjà savoir combien il y a de grimpeurs, non ? Et puis c’est quoi un grimpeur au point de vue statistique ? Quelqu’un qui a grimpé une fois dans l’année, une fois par mois, toutes les semaines ? Je n’ai pas la réponse…
Y-a-t-il vraiment une place pour la presse écrite en escalade ?
Bien sûr, la preuve on est là ! Même si cette presse n’intéresse qu’une partie des pratiquants de la discipline (escalade ou ping-pong ou autre), elle occupe une « niche » existante car tous les univers ont « besoin » d’une presse spécialisée. L’escalade ne déroge pas à la règle et ça fait maintenant quinze ans que Grimper le démontre.
Etre seul sur le marché, une force ou un handicap ?
On n’est pas seul ! Il y a un autre magazine d’escalade sur papier qui existe… Ce n’est pas parce que c’est gratuit que ce n’est pas un concurrent ou que ça n’existe pas !
Bah…Rédac-chef du seul magazine de grimpe, ça permet de faire la pluie et le beau temps non ?
Je me répète donc, mais je ne suis pas seul. Ensuite, faire la pluie et le beau temps, certainement pas. Ce serait nous accorder bien trop de pouvoir ? Avoir une influence sur certaines choses, sans aucun doute en revanche.
As-tu déjà refusé des annonceurs ?
Non, d’une part parce que la partie publicitaire n’est pas mon boulot, mais surtout parce que cela n’est pas autorisé par la loi (c’est assimilé du refus de vente !). Il me semble que seules les publicités qui vont radicalement à l’encontre de la ligne éditoriale du support peuvent être refusées par l’éditeur, mais encore faut-il pouvoir le motiver sérieusement.
As-tu déjà censuré ou tempéré les propos de certains avant de les publier ?
Effectivement j’ai déjà taillé dans un texte en en informant l’auteur et en lui soumettant la version revue pour accord.
Mais quelle est cette dallouze en 6 de St pan ?

Pour toi, quelles sont les qualités d’un bon journaliste sportif ?
Je ne nous (Fred et moi) considère pas comme des journalistes sportifs. On fait juste un magazine sur une activité dont seule l’une des facettes (la compétition) est sportive. Pour le reste, la grimpe telle que je la conçois est bien plus qu’un simple sport. Sinon, en ce qui concerne le travail de journaliste, la base pour moi est de vérifier dans toute la mesure du possible la véracité des infos que l’on souhaite diffuser et ou au moins la crédibilité de son rapporteur. Pour moi, il est préférable de ne pas diffuser une info dont on n’est pas sûr plutôt que de laisser passer une grosse connerie. Et même en faisant attention, il arrive qu’il y ait des boulettes qui passent entre les mailles du filet.
Pour toi, quel serait l’exemple d’un bon magazine de sport ?
D’un point de vue économique, un bon magazine, de sport ou non, est celui qui rapporte de l’argent (ou au moins qui n’en perd pas). Pour cela, il faut que le public réponde présent en achetant ce magazine (ce qui signifie qu’il leur convient, au moins partiellement) et que les annonceurs y prennent des pages de publicité (ce qui prouvent la valeur du support). On peut faire tous les plans sur la comète qu’on veut, la première des bases pour faire un magazine, c’est celle-là : sa pérennité économique. Et c’est pareil pour les gratuits, sauf qu’eux dépendent uniquement des recettes publicitaires et qu’ils ont donc potentiellement moins les coudées franches car étant totalement dépendant d’une seule source de revenus.
Quelles sont les particularités de la grimpe ?
Une particularité essentielle quant aux performances que l’on relate : le principe de confiance a priori en la parole donnée. Pour moi, lorsque quelqu’un annonce une perf’ crédible par rapport à son niveau, je le crois (ce qui ne m’empêche pas de tenter d’avoir des infos pour valider…). En revanche, une fois que je vous ai pris la main dans le sac une fois, aïe pour vous… Il y a des gens qui ont été ou sont encore bannis de nos colonnes pour ça.
Quel est le meilleur magazine d'escalade du moment ?
Franchement, je ne me pose jamais la question en ces termes, ça n'a pas de sens. Déjà, il y a quand même très peu de magazines (je parle là même au niveau mondial) qui ne soient consacré qu'à l'escalade. En France on a Grimper et Escalade Mag, en Espagne il y a Escalar, aux USA il y a The Dead Point et Urban Climber... et puis on doit à peu près avoir fait le tour, là ! La plupart des magazines ont une ligne rédactionnelle mêlant escalade, alpinisme, ski de rando, bref tout l'univers de la montagne. L'explication est simple : il est difficile de faire une magazine consacré uniquement à la grimpe, d'abord pour des raisons commerciales (public plus limité qu'un mag plus généraliste sur la montagne) mais aussi saisonnalité... et quelques autres raisons. Mais bon, si c'était si facile de faire un magazine de grimpe, ça se saurait et il en aurait plein d'autres ! Or donc, pour revenir à la question initiale, je ne crois pas que l'on puisse dire quel est le meilleur. Chacun travaille à sa façon, a normalement une ligne éditoriale, un traitement de la direction artistique différent, un ton d'écriture, bref tout ce qui fait l'unité et l'unicité d'un titre qui fait qu'il convient à un type de public et pas à un autre. Comme on ne compare pas des carottes et des navets, il est impossible de comparer Grimper et des magazines étrangers qui s'adressent à des publics différents du public français. Donc, le meilleur magazine d'escalade pour le public français, c'est Grimper ! Plus sérieusement, j'aime bien ce qu'a produit The Dead Point sur ses premiers opus. Allez jeter un oeil, c'est assez classe.
Tu rêves encore en sélectionnant des photos ou en lisant des articles pour Grimper ?
Heureusement, sinon, il faudrait vite que je passe à autre chose. C’est quand même assez grisant de découvrir tout le temps des nouveaux lieux, des nouvelles personnes.
Trop loin, St Victoire, Super Medius 6c+
Dalle quand tu nous tiens...

Bosser dans le milieu a-t-il changé ta vision de la grimpe, ta façon de pratiquer ? Ma vision de la grimpe pas vraiment, mais ma façon de pratiquer c’est sûr : avant je grimpais plusieurs fois par semaine, maintenant juste quand j’ai le temps !
Vivre de sa passion c’est finalement toujours être au boulot ?
En partie oui. Et c’est pour ça que j’ai toujours essayé de ne pas me mettre en avant au titre de Grimper, pour bien couper ce qui est mon boulot dans l’escalade et ce qui est ma pratique personnelle. Quand je vais grimper quelque part, ce n’est pas pour que l’on vienne me voir pour me parler du magazine ou me proposer des articles. Ca peut arriver et cela ne me gêne pas tant que c’est marginal.
Une question d’un ami commun, dont le nom commence par Fran et se termine par çois : "Avec Yush vous avez comme point commun un physique hors norme, particulièrement redoutable en escalade. En quoi cela vous avantage-t-il par rapport aux grimpeurs normaux ?"
C’est vrai que mon gabarit est indéniablement un avantage pour la grimpe. Quand tu mets presque 80 kilos sur les prises de pied, ça avance sérieusement dans les voies ! C’est pour ça que j’ai pris 15 kilos en 15 ans, pour devenir de plus en plus fort. Et encore, le fameux ami commun ne m’a pas vu depuis un bon moment… Il va être surpris la prochaine fois !
Plus sérieusement, le (sur)poids n’est plus mon ennemi depuis longtemps, depuis que j’ai placé la perf’ en second plan. Et de toute façon, je pense que ce n’est réellement un problème que dans quelques cas (les trucs vraiment à doigts ou bien broutants). J’ai continué à grimper dans le 8 en faisant plus de 75 kilos, alors je ne vois pas pourquoi je me priverai de quoi que ce soit pour la grimpe.
Et pour finir, un conseil de pro pour lacuvette ?
Continue de faire ce qui te plaît sur ce support sans que ça bouffe ton temps de grimpe ni celui en famille ! Et attention aux fautes d’orthographe…
Comme Lacuvette fête ce mois ci sa première année, que lui souhaites tu pour l'avenir et surtout que pourrais-tu offrir aux cuvettards pour marquer l'évènement ?
D'abord bon anniversaire à Lacuvette, c'est sûr que le cap de la première année est marquant. Je souhaite donc à ce blog une vie aussi longue et amusante que les textes publiés régulièrement par son géniteur et surtout de garder cet esprit dans lequel il est fait. Quant à ce que je pourrais offrir aux cuvettards, hormis l'assurance de ma considération distinguée, je ne vois pas trop ! Je n'ai pas de posters de moi entièrement nu, pas de places pour la finale du prochain Superbowl, pas d'enveloppes débordant de cash ni de tickets gagnants au Superloto... En cherchant bien, j'aurais peut-être bien quelques stickers à coller sur la lunette arrière de votre caisse, mais bon...
Ula, au Verdon, l'autre Presles...

Décidemment, vous vous êtes passés le mot avec Nico, le Planete-Bloc Master, à propos des stickers…En contrepartie, Lacuvette offre un de ces magnifiques autocollants dédicacés à celui qui identifiera les voies sur les photos de St Pan et de Presles.
Merci quand même Jean Marc de nous avoir accordé quelques instants de ton temps précieux. J’espère que les lecteurs curieux sauront apprécier tes propos et profiter d’une de tes rares apparitions sur le net, pour réagir, s’exprimer voir t’interpeller largement. A noter que les quelques interviews restent disponibles dans la rubrique Paroles de stars (voir les Themes à droite), si comme moi vous ne comprenez pas tout la première fois…
En tout cas, ce fut un véritable bonheur d’évoquer avec toi un brin de l’histoire de Lacuvette et un réel plaisir de partager ta vision de notre activité et de son petit business. En espérant pouvoir enfin à notre tour, savourer le privilège de t’indiquer de mémoire le crux de quelques uns des nouveaux bijoux locaux que tu n’as pas encore eu le temps de découvrir !!
Sur ce, je retournerai bien aux Lames. Il me semble même qu’il y en a un qui serait ravi de monter taper son millième essai dans le premier 8a de tout vrai cuvettard qui se respecte, La poudre, avec l’éthique des anciens, sans préclipper du 3eme, sans shunter le départ en passant par la gauche, sans se vautrer dans le dièdre en haut et sans s’arrêter au maillon posé sur le dernier point…

lundi 5 janvier 2009

Le déclic

Je vois déjà les plus lubriques d’entre vous amorcer un sourire vicelard en imaginant lacuvette se perdre en dithyrambes autour de Manara et de son célèbre Déclic. Mais ce sera plutôt de François qu’il sera question, mais que les plus tordus se calment, on restera des plus corrects, pour une lecture possible même pour les moins de 18 ans. Chacune de ses rencontres change notre regard sur le monde, notre perception des éléments. Une fois encore, en le quittant je n’étais plus le même, j’avais grandi, muri. Je surprenais même mes petits eb, après s’être entretenus avec leur père, offrir un festival de sensation comme jamais auparavant. Ses judicieux conseils de Maitre décolle, dalle technique à souhait du petit secteur de St Sulpice avaient remis les pendules à l’heure : ‘’la dalle c’est la base, reste à l’écoute de tes petits orteils boudinés, fais leur confiance, charge à fond et ils s’exécuteront …et tu pourras plus tomber’’. Il avait raison, avec ces 2 inverses dans les mains, le pied gauche sur une même ligne horizontale…jamais je n’aurais pensé pouvoir me redresser et atteindre cette pince si lointaine et si foireuse.
De retour en terre cuvettarde, il fallait mettre à profit les paroles du maitre. D’après Sylvain et GrandLudo, pas d’autre alternative que de monter aux Lames. De toute façon, on se devait de rendre hommage à ce site historique, comme le veut la tradition, chaque hiver lorsque la température s’aventure en dessous des zéros degrès. Nous redécouvrions ces dalles coupées au couteau, ces murs d’une pureté inégalée….je levais les yeux sur cette ligne, me préparant pour un Combat de Rue, un arc de cercle parfait, une dalle faiblement inclinée, débonnaire presque, et pourtant 8a. Plus de deux ans déjà que je m’évertuais dans le crux dit ‘’du skieur’’, étrangement ressemblant à celui démystifié par François quelques jours auparavant. Une section toute en finesse, de minuscules renfoncements pour les pieds pour atteindre une simple ligne horizontale de prises. 2 mains et un pied gauche pour développer jusqu’à une pince invisible, tellement loin, tellement difficile à valoriser…Comme par reflexe, je pris mon élan, développant sur mon eb à m’en faire péter la cuisse et laissant l’autre pied à la dérive, racler la moindre des aspérités. Plusieurs milliards d’essais à échouer toujours là, la main gauche désespérément tendue vers le ciel…Je poussais, poussais et poussais encore, entre 2 respirations, la sage femme me tenant la main et m’encourageant… jusqu’à sentir miraculeusement mon pouce se replier doucement sur la pince, l’autre main s’équilibrant avec un sucre minuscule pour permettre au deuxième pied de se caler sur la bonne marche.. Un bref instant de grâce… et le mouvement de toute une vie gisait là, vaincu, juste en dessous de moi…
L’effet François ne pouvait s’arrêter en si bon chemin, Sylvain faillit en faire les frais dans la foulée, avant qu’une vilaine onglée ne vienne lui remettre les pieds et surtout les doigts sur terre. Il en eut fallu de peu pour que Le cheik soit Mat, joli et technique 7a en dalle. Un rappel à la dure réalité, comme la vision des ces rallonges immondes dans la dalle alvéolée de la mémoire des vaincus, 8bsi justement décriées dans le dernier billet d’humeur de Ludo dans Grimper…les mutants seraient-ils aussi corrompus ?
Et puis, comme pour chasser les mauvais esprits, je surpris GrandLudo à soupirer en contemplant le mur lisse de La poudre. Je compris alors qu’il serait le prochain sur la liste, heureuse victime à son tour de l’effet François. 2 jours plus tard, le temps de l’incubation et la contagion s’avéra. Tirés de nos préparations festives de la St Sylvestre, il nous convainquit de venir lui tenir compagnie quelques heures aux Saillants du Gua, histoire de finir l’année les doigts sur du caillou. A son tour, 2 années plus tard, après de longs errements en méthodes douteuses et autres égarements en placements utopiques puis enfin conscient "qu’avec des méthodes de sumo, c’est toujours trop rando", l’explosion allait avoir lieu. Un milliard d’essais plus tard, calé sur un talon monté aussi tôt que possible, il jetait enfin sur la pince finale de Sale lierre dur, le 8a du secteur Petit Nice.

Comme une trainée de poudre, les 2 autres 7c du secteur allaient subir le même sort. A commencer par Les gestes pour le dire, intense et futur 1er 7c de Sylvain…5 ans après les premières visites et encore un retour à l’inévitable méthode du sumo, sans le joli croisé mais avec une inversée coupante un jeté désespéré. Un deuxième milliard d’essais plus tard et toute une vie ponctuée de runs avec Francky, Schnappi et Sylvain, reléguée au rang de simple souvenir . Emporté par l’ivresse Sylvain rata de peu l’exploit…ne désespère pas…dans quelques années viendra aussi ton tour !!

Pour ne pas s’arrêter en si bon chemin le bougre GrandLudo clotura l’année avec un bon bourrinage au premier essai dans protection rappochée, le 7c de droite, admirablement guidé par des méthodes dignes d’une démo de tectonique de sumo éméché en plein soir de Réveillon.
Et 2008 s’acheva sur cette note finale encourageante. 2009 débuta avec les paroles d’un Oliv surmotivé, malgré les cernes et la fatigue de la veille, déballant son tout nouveau lot de prises fabriqué par l'atelier clandestin de Planète Bloc, par de petits chinois travaillant 20h par jour sans jamais voir la lumière du jour, sous l'oeil tyranique de Nico le PbMaster : "Faut toujours grimper le premier Janvier, car on ne sait jamais de quoi sera fait le reste de l’année"….et une séance sur le pan fraichement sorti de la hotte du gros bonhomme rouge à barbe blanche, une !!!