mercredi 30 décembre 2009

Battery

Mon anglais courant m’inspire quelques doutes, car outre manche les faux amis sont légions. J’avais envie de parler de batterie mais comme je ne raterai pour rien au monde la moindre occasion de caser une allusion musicale aux quatre fameux horseman qui ont bercé toute mon enfance… Pour s’endormir, rien de tel que cette superbe intro, une espèce rare de mélodie envoutante …de quoi donner une réelle profondeur mystique.. S’en suit le riff percutant d’une marque de fabrique que ne retrouva nulle part ailleurs depuis.

Bref, j’aurais préféré que mon problème de batterie arrive le 24. Cela m’aurait épargné une morne journée au boulot. Pour la première fois je dus allumer la lumière en arrivant et l’éteindre en partant. J’étais seul sur cet immense plateau paysager, lui qui était pourtant censé développer la communication, la circulation d’idées novatrices et renforcer l’esprit d’équipe. Il y avait presque quelque chose de surnaturel, d’incongru…un peu comme ces samedis matins où la raison devrait nous pousser à rester au chaud sous la couette au lieu de se soumettre à une folie cuvettarde nous menant droit à la surgélation, au pied d’une falaise. Je ressentis de nouveau ce délicieux sentiment d’anormalité lorsque je me retrouvai à la machine à café. Alors que d’accoutumée je passe plus d’une heure en serrage de mains, en bises et en vaines discussions sur la météo, le cours de la bourse, l’épidémie de grippe A ou encore la vie de famille de ceux que mon voisin de bureau définit si justement comme de simples relations de travail, imposées par notre hiérarchie.
Un problème de batterie donc, quelques coup de clé dans le contact, un semblant de vrombissement toussoteux et finalement plus rien. Heureusement, ce ne fut pas au moment de rejoindre les cuvettards à Voreppe. Mais j’ai échappé de peu à la lapidation car on a failli louper notre rendez vous avec le père Noël. Le vrai bien sur, pas celui qu’on voit partout dans toutes les grandes surfaces. J’en suis sur, ce sont mes enfants qui me l’ont affirmé.
Un coup de froid, un peu d’humidité et voilà le moteur qui cale. J’eus la même impression en observant une foule de cuvettards, tous venus taper des essais dans le cultissime Bouze maker 7c, de la grotte de Voreppe. Un moteur qui fait semblant de se lancer, puis qui s’éteint au bout de 4 mouvements, incapable de fournir la puissance nécessaire à fermer le bras pour passer le crux. On à beau observer les différences de styles, de couleurs, d’éthique, de carrures, de tenues… le résultat en bien toujours le même. On nous rabâche pourtant à longueur de temps que la mixité, le mélange et le brassage des genres resterait le meilleur moyen d’avancer…

Puisqu’on parle de bricolage, j’ai du sortir mes plus beaux outils, pour ma batterie mais surtout pour accéder au pied de Fading Light, le 8a de Voreppe.

Dire qu’ils sont si nombreux à parcourir le monde, même Schnappi serait en pleine quête du coté de Seynes…En plus de battre le record de l’empreinte carbone de l’écolo grimpeur, ils cherchent tous la plus belle colo du monde. Mais aucun d’eux ne peut songer qu’elle se cache tout simplement ici, en pays cuvettard. Protégée, dans son écrin de verdure bordé par la zone industrielle et la route nationale, elle se cache au dessus de la petite grotte. Une véritable invitation à venir se laisser dévorer par cette immense mono colonne qui offre 30m de conti, à se frotter sensuellement contre elle, à la serrer avec fougue entre les cuisses et à repter langoureusement le long du sa peau si lisse et si douce.
Voreppe. Cette falaise regorge de merveilles, qui se laissent découvrir pour peu qu’on décide de se laisser apprivoiser…pour y grimper….autrement. Ptit rond, un simple 7b, dont l’histoire est étrange…équipé puis déséquipé, puis rééquipé puis de nouveau déséquipé, et enfin de nouveau rééquipé par Sunny. L’une des rares voies de LaCuvette dont le relais se clippe à la perche. A peine 10 mouv bien péchus. Juste de quoi donner de fil à retordre à Jean-Yves, Luca, Ludo et Sylvain…sous le regard complice de l’œil de LaCuvette…


Bonne année à tous, que 2010 permettent à tous les cuvettards de (re)découvrir les joyaux cachés de nos falaises, mais sans trop en ébruiter l’existence, juste pour que l’on puisse y couler encore de nombreux jours paisibles et heureux…

dimanche 20 décembre 2009

Enfin

L’année touche à sa fin. Avant que ce ne soit l’heure des bilans, les préparations de Noël ont fini par balayer la petite déprime de Novembre avec sa grisaille ambiante et ses jours trop courts. La magie du vieil homme à la robe rouge a fait tomber les premières neiges, juste pour adoucir les bruits de la civilisation et colorer la ville d’une blancheur froide et féérique. Alors que le climat devrait dangereusement se réchauffer, je relevai -8°C ce matin alors que je m’en allais, le béret fourré sur la tête, acheter ma baguette et mon journal…en luge… Croire encore au Père Noël, c’est surtout se permettre de vivre encore et toujours quelques instants incroyables, complètement déraisonnables, et souvent incompréhensibles aux yeux des adultes. Tandis que certains avaient l’onglée, à la maison rien qu’à sortir du lit, Sylvain et Jean-Yves me récupéraient déjà, le jour à peine levé. A grands coups de publications scientifiques (page 9), je les avais persuadés de la chance que Lacuvette nous avait accordée. "La nature calcaire du sous-sol n’est pas propice à la rétention de l’eau sur la colline de Comboire. Si on y ajoute l’exposition ensoleillée des versants sud et est on comprend que la faune et la flore doivent faire face à des conditions quasi méditerranéennes. On rencontre sur la colline de Comboire des espèces dont l’aire de répartition principale se situe beaucoup plus au sud et dont la présence, ici, est exceptionnelle. Le genévrier thurifère est ainsi un arbuste dont les principales populations se situent au Maroc. Les falaises de Comboire constituent l’un des sites les plus nordiques de cette espèce". Il n’y a pas de fumée sans feu, et nous allions donc être les seuls et uniques privilégiés à profiter de ce micro climat saharien. Grâce 4 pneus neige, nous arrivâmes finalement assez facilement au parking de Comboire. Contre toute attente, il fallut faire la trace pour accéder à la falaise. Et personne ne vint perturber la sérénité de ce samedi matin. Une falaise d’un autre temps dont les platasses et les grosses pinces se prêtent à merveille aux conditions du jour. Et quelques vestiges du temps des premières prises en résine, lorsque les salles d’escalade n’existaient pas encore. Entre les coulées de glace éphémères et l’irréalité des stalactites, Jean-Yves choisit de se réchauffer dans une voie spécialement conçu pour être longue et continue, Fleur de nave, 7a+, du secteur des toits. Dans une toute autre filière et surtout pour ne pas que l’onglée n’ait le temps d’arriver, Sylvain enchaina, globalement, au prix de trésors de finesse et de technique, le très court mais rigolo Vieil Arsenic 7a. Attention, âme sensible s’abstenir puisque l’on peut entrapercevoir qu'à un bref moment, il tente de poser un pied.

Enfin, je glissai moi aussi, sur la strate verglacée de la fin de la traversée de la conque d’El condor buta, 7c. Encore une voie unique à l’ambiance torride et à l’inconfort permanent.En parfaite communion avec la nature, tandis que le soleil poursuivait sa course au raz de l’horizon, nous basculions vers le secteur face sud pour pleinement profiter de la chaleur de ses timides rayons. L’occasion de rendre visite à 2 pas de bloc mythiques qui ont contribué à la légende de la falaise. A commencer par Belles et buts, le 7b dont la méthode de la pointe contre pointe resta encore à l’état de vague utopie pour Jean-Yves et Sylvain. Ce qui me permet de recycler une vielle photo de Ludo qui en 2004 randonna la belle sans prendre de but…et avec l’aisance qu’on lui connait. La deuxième, Rock Accro, le 7b+ de droite. Deux plats pour démarrer, puis 2 inexistences à relancer main gauche, les pieds en vrac jusqu’à une lointaine inverse. Un mouv qui, avec Ludo nous avait encore ramenés à la dure réalité des vraies cotations, et ce, à maintes reprises. Et puis, ce jour, surement aidé pour la magie de Noël et par l’incroyable collante, je réussissais miraculeusement à m’envoler avec ces 2 plats, puis à recoller pour tenir et enfin bloquer cette règle pince bizarre...
Et dire que ce matin, les deux mains collées autour de mon bol de café j’ai bien plus froid qu’hier, lorsqu’on tapait des essais…Merci Père Noël pour ses falaises et ce micro climat qui permet au petit monde de LaCuvette de trouver son bonheur par tous les temps, et en toute saison !!
Et n’oublie pas mon petit soulier…
Le reste des photos du pole nord >>ICI<<

dimanche 13 décembre 2009

La base

La base…c’est ce que je rabâche au boulot, à chaque fois que l’on monte de nouvelles équipes. Le coup du pot et des cailloux fait toujours sont effet. Imaginez un immense pot de verre ainsi qu’une douzaine de cailloux à peu près gros comme des balles de tennis. Je les place délicatement, un par un, dans le grand pot. Lorsque le pot est rempli jusqu'au bord sans qu'il soit possible d'y ajouter un caillou de plus, pensez vous que le pot est plein ? Indubitablement, vous me répondrez en cœur "Oui". Imaginez maintenant un sceau rempli de gravier. Que se passerait-t-il si je versais délicatement ce gravier sur les gros cailloux, en brassant légèrement le pot ? Et bien les morceaux de gravier s'infiltreront entre les cailloux... jusqu'au fond du pot. Devant votre yeux ébahis et médusé, invariablement, je reposerais la même la question : "Est-ce que ce pot est plein ?". Méfiants cette fois, vous me répondriez "Probablement pas !". "Bien", vous féliciterais-je alors en sortant de sous la table un seau de sable. En le versant dans le pot, le sable ira remplir les espaces entre les gros cailloux et le gravier. Une fois encore, je vous demanderais "Est-ce que ce pot est plein ?". Cette fois, à l’unisson j’entendrais "Non !". Je finirais alors avec un pichet d'eau en remplissant le pot jusqu'à ras bord. A chaque fois, je laisse un long silence, histoire que tous comprennent d’eux même que lorsqu’ils pensent avoir un agenda complètement rempli, et bien, en le voulant vraiment, ils pourraient toujours y ajouter plus de rendez-vous, plus de choses à faire…Après ce premier degré évident, je termine toujours en gardant la tête haute, en concluant que la grande vérité que démontre cette expérience est toute simple : si on ne met pas les gros cailloux en premier dans le pot, on ne pourra jamais faire rentrer tout le reste ensuite. Ce qu'il faut retenir, c'est l'importance de faire passer ses gros cailloux en premier…La base quoi, en somme…
C’est ce qu’on avait eu tendance un peu à oublier ces derniers temps en nous perdant en pays Vertaco. Il fallait rectifier le tir et revenir à des valeurs sures.

Espace comboire donc, et pour remettre les pendules à l’heure rien de tel qu’un bon vieux Peau de balle, simple 7a+ du secteur extrême gauche. Dépités par un départ des familles et par une fin subtile en dalle, Jean-Yves et Sylvain me broyèrent de rage ma toute nouvelle perche. Ils tentèrent ensuite de se rattraper avec la réjouissante perspective de piquer les premières réalisations du rebord du monde, 7a un superbe voyage initiatique en arc de cercle, au bout de la vire, dans un rocher gris parfaitement sculpté, et du Trou de balle, un 7b/7b+ dans le plus pur style Espace Comboirien, en léger dévers, court, sur plats, angles et rondeurs, à dynamiser, tout en douceur…Mais l’ordre des choses ne pouvait subitement s’inverser, et ces 2 FA revinrent finalement à l’éternel sumo, ermite équipeur du lieu. GrandLudo s’offrit les 2 premières répétitions au prix de biens beaux efforts, tandis que Bruno et Sylvain décrochèrent la 2eme et 3eme du Rebord du monde. Quant à Luca, il doit toujours, à l’heure qu’il est, s’acharner avec Richard pour empocher la 2eme et la 3eme du Trou de balle.Comme pour tant d’autres choses, la grimpe n’échappe pas à la règle. Certains voies se sont imposées d’elles mêmes, sans qu’on ait besoin d’en parler. Des sortes de rituels ancrés dans la mémoire collective, auquel il faut se soumettre pour passer à l’âge adulte. Pourtant, ce sont souvent ni les plus belles, ni les plus dures…mais elles recèlent ce brin de je ne sais quoi singulier, qui en ont fait des passages obligés. L’arme à l’œil par exemple pour le 7b. On ne peut se prétendre cuvettard sans avoir fait le 8a de la Poudre, aux Lames…n’est-ce pas Schnappi ?….Il faut avoir fait Strapper français, le 7a+ du mas d’Auris. On ne peut se soustraire à la redoutable fissure de l’Ampoule de jardinier à Voreppe, ni à Bouse maker, sa bien aimée voisine de droite, toutes deux 7c. Cette dernière s’est même vu parcourue en son temps, par Clém, un des mutants rioupéristes pourtant des plus réfractaires à l’usage de la corde. C’est ainsi que ces 2 voies ont fait l’objet de nombreuses visites ces dernières semaines. A commencer par Oliv, Luca et bientôt Sylvain pour Bouse maker, la bien nommée, suivis de Schnappi, Charlie et Pierrick pour le mythe en toit de l’Ampoule…lassés par trop de 8b dans le Vercors surement plus…conventionnels…et aux couchés de soleil moins exotiques.Avec Ludo, on se devait participer à la fête, en tentant nous aussi d’allumer l’Ampoule. On vit alors 2 écoles radicalement différentes, celle du guerrier insensible à la douleur et inconscient, avec Ludo qui coinça tout les parties protubérantes de son anatomie dans cette grosse fente gluante, opposée à celle de la fluidité de celui qui affleure avec douceur le rebord de la lèvre de cette magnifique fissure en toit, se contorsionnant avec souplesse et grâce pour épouser à merveilles les caprices de dame nature… Même topo dans Bouse maker entre la débauche hormonale d’Oliv qui tente de tout faire no foot et Luca qui se la joue fillette effarouchée à la calvitie naissante en tentant, carre externe, lolotte et prises intermédiaires… Mais la base ça reste bien de serrer les croutes, et si possible en dalle. C’est ainsi que Lol et Martin auraient été aperçus en plein ébats, le cul bien en arrière…dans Amour…toujours, le 8b dalleux et passage obligé des Lames. Autres lieux mais toujours une parfaite dalle grise avec Iaki qui revient aux sources de Saint Sulpice, dans Le maître décolle, élève la voie, un superbe 8a que l’on doit au grand monsieur FT. La base, c’est surtout de ne plus se poser de question, de suivre l’instinct primitif de l’espèce cuvettarde, celui là même qui nous sort du lit ces matins d’hiver gris et froids, juste pour le plaisir de se choper une onglée dans une de ces voies mythiques dont la simple évocation du nom suffit déjà à nourrir nos fantasmes…Comme la Foué famely’s qui rêva de trous et de monos, et qui le lendemain matin au réveil fit 500km pour se poser au pied des murs blancs du Saussois. Quelques instants plus tard, le sourire aux lèvres et le devoir accompli, les brothers clippaient le dernier point d’un monument de l’histoire de la grimpe, Chimpanzodrome, 7c+.

Bravo messieurs, c’est bien ça, avoir la foi !!